Léo Girardin vous explique l’origine et les particularités de l’univers de Niil.
Peux-tu nous présenter l’univers dans ses grandes lignes ?
Tout d’abord, Niil, c’est le nom de la planète. La région d’origine des PJ et où se dérouleront 99% de leurs aventures est une grande ile appelée Sardoréan. Celle-ci est coupée du monde par une immense et infranchissables chaine de récifs, les Récifs de Gorton, du nom du magicien qui les a créés. Grâce à ces Récifs, les habitants de l’ile (qu’on sépare en deux groupes, l’Humanité et la Féerie ; la Féerie, c’est à peu près toutes les races non-humaines, non-animales et non-morts-vivantes, à savoir les elfes, les nains, les gnomes, les orques, les dragons, les nymphes…), les habitants de l’ile, donc, sont protégés d’une invasion de Démons qui a frappé le continent il y a plus de 150 ans et dont on n’a aucune vraie raison d’imaginer qu’elle ait été repoussée. Mais en échange de cette protection, les Récifs introduisent de nombreuses difficultés. En particulier, les ressources se tarissent et cela attise les tensions entre les différents peuples et les différentes races qui sont déjà fortes du fait d’antécédents historiques. Dans ce contexte général, plutôt sombre, les PJ jouent des Sardoriens (ethnie humaine de type arthurienne), des Irnyans (ethnie humaine théocratique vivant sous l’Inquisition), des Namisses (ethnie humaine de marchands cupides et rusés), des Wendaliens (les magiciens humains comploteurs), des elfes (très xénophobes), des nains (très militaristes) ou des gnomes (nains de jardin anarchistes). Chaque groupe a sa spécificité qui, je l’espère, le démarque un peu des canons usés du genre médiéval-fantastique.
Que signifie le nom de l’univers, Niil ?
Rien ! On m’a souvent demandé si ça avait un quelconque rapport avec nihil, le mot latin pour néant. La ressemblance est en fait une pure coïncidence. Quand j’ai choisi le nom de mon univers, il y a de ça bientôt dix ans maintenant, je cherchais un nom simple, frappant, mémorisable facilement. J’ai été séduit par l’idée rigolote d’une double voyelle. Voilà, c’est à peu près tout, le reste c’est de l’aléatoire. À l’époque, Niil ne ressemblait pas du tout à sa version actuelle et le second monde de son multivers s’appelait Aam : encore un nom court avec une double voyelle. Aam n’existe plus mais Niil a survécu !
Comment en es-tu venu à imaginer cet univers ?
La maturation a été longue et lente. Au tout départ, en 2006, c’était simplement histoire d’avoir une carte du monde pour mes parties de D&D 3.5 avec mes copains du collège et du lycée. Le premier grand remaniement a eu lieu à la fin de ma seconde, donc à l’été 2007, quand le premier Niil a vécu une apocalypse qui n’a pas laissé de survivants. Ça m’a donné l’occasion de faire le ménage et d’affiner l’univers. La seconde version est celle qui a débarqué sur Internet, sur le Scriptorium puis sur niil.fr (j’ai acheté le nom de domaine en 2008). La troisième mouture, celle sur laquelle Etory et moi-même avons bossé tout ce temps, est le fruit d’une maturation supplémentaire à la fin de ma première année de master. Pour faire simple, Game of Thrones d’un côté (série puis bouquins) et le film Stardust de l’autre ont renouvelé mon imagination et m’ont donné envie de faire un truc dans lequel la distinction entre l’Humanité, sombre et désespérée, et la Féerie, magique et mystérieuse, serait forte et constitutrice. Les bouquins de David Gemmell, dans lesquels des humains complexes et tout en nuances de gris se battent pour leur survie, soit entre eux, soit face à un Mal cosmique qui n’a a priori pas de contrepartie, ont été la troisième source d’inspiration majeure. J’en ai profité pour remanier la carte de Sardoréan, afin de changer les noms qui posaient problème (« Uréïn… urine ? ») et de transformer la Frontière magique avec laquelle j’avais toujours été mal à l’aise en une chaine de Récifs, une superbe idée d’une de mes joueuses.
Quelles sont selon toi les principales particularités de Niil, par rapport à d’autres univers med-fan ?
Tout d’abord, bien que l’héritage de Tolkien et de D&D soit assumé et rapidement visible, j’ai essayé de renouveler les « vaches sacrées » que peuvent être les elfes, les nains et les orques, par exemple. Ceux de Niil sont plus complexes et s’inscrivent dans un monde nettement moins manichéen.
Ensuite, la délimitation claire de la zone de jeu par cette chaine de récifs distingue fortement Niil des univers commerciaux dans lesquels on peut toujours aller plus loin, dans une nouvelle région. Je suis parti du principe que le niveau de détail d’un endroit donné de l’univers serait forcément inversement proportionnel à l’étendue de l’univers. Ainsi, en me restreignant à une zone environ aux dimensions de la France, j’ai pu aller, je crois, nettement plus loin que ceux qui s’essayent à la description d’un continent ou d’une planète entière. Vous finirez par connaitre toutes les régions de la carte ; mais elles survivront toutes à un premier passage et quand vous y retournerez, elles auront encore des secrets à révéler !
Enfin, un troisième point, crucial dans l’histoire de Niil et qui influence fortement les campagnes que j’ai pu mener dans cette nouvelle mouture, c’est le multivers Niil – Féerie – Enfer articulé par la Grande Prophétie. Je ne vais pas en dire trop, c’est une longue histoire, mais sur Niil, le médiéval et le fantastique interagissent d’une manière nouvelle, pas très surprenante en vérité, mais qui n’avait pas encore été vraiment explorée dans le monde du JDR à ma connaissance.
Quels sont tes projets pour la suite ?
Il y a déjà deux extensions quasiment terminées, le Guide du Maitre et le Guide d’adaptation pour Fantasy Craft. Elles devraient sortir incessamment sous peu !
Pour la suite, il faut quand même savoir que j’ai beaucoup moins de temps libre que dans ma prime jeunesse. Le développement futur de la gamme va donc être fortement conditionné par le succès de Niil – Univers. S’il y a de la demande, je compte commencer par d’autres guides d’adaptation pour divers JdR (je crois que celui pour PMT est dans le cartons d’Etory d’ailleurs). Une fois que tous les MJ utilisateurs de Niil auront le guide pour leur jeu favori, on se tournera vers les autres possibilités. Mon style de MJ comprend beaucoup d’impro et de développements autour des historiques des PJ et donc se prête assez mal à des rédactions détaillées de scénarios ; vous en trouverez toutefois quelques uns, dans un format qui me plait, dans le Guide du Maitre. Si ce format plait à d’autres, peut-être plancher sur de nouveaux scénarios, mais ça ne me parait pas être la direction à privilégier. Je pense que la suite de la gamme gagnerait plus à se tourner vers, par exemple, des extensions thématiques sur telle ou telle ville, telle ou telle région, telle ou telle faction. Dans tous les cas, ça dépendra de ce que demande le public.